Edmee

EDMÉE BENINTENDI

Place du Vieux Marché

« Mon père était Auvergnat. Il est venu de la Lozère. Ma mère était une Vaisonnaise. Elle est venue dans la Haute Ville quand elle s’est mariée. Mon père était chauffeur poids lourds pendant 45 ans au moulin de César. Il charriait des balles de farine. Maman ne travaillait pas, elle faisait un peu de couture, elle raccommodait tous les pantalons.

Le Lavoir

Dans Vaison pas de maternité. On a dû aller à Avignon parce que mon frère avait failli mourir à sa naissance et le docteur nous avait envoyés là-bas, mais beaucoup de femmes accouchaient chez elles.

 

« Quand on était jeune, on n’était payé que le samedi….et le samedi quand tu avais l’argent tu allais payer à la boucherie Charles et tu n’avais plus rien. Tout était en compte et on réglait à la fin de la semaine.

Il n’y en n’avait qu’un seul magasin dans la Haute Ville.


C’était l’épicerie de ma marraine ..Il y avait aussi une petite épicerie là où il y avait des poteries, en face des Pénitents Blancs, et il y a eu aussi une boulangerie là où il y a un four dans le garage, qui a vite fermé, les boulangeries n’ont jamais marché dans la Haute Ville.

Il n’y avait pas d’école ici. La maison de Philippe Dautrey (nos 7-9 Place de l’Église) en face de l’église était fermée: c’était l’ancienne école primaire. ..L’église était ouverte à tous vents mais il n’y avait rien, elle était en ruines. On jouait à cache-cache dans le confessionnal !


On n’avait pas de jouets car on était des ouvriers et on avait tout juste assez pour manger; on s’amusait avec des casseroles, en gardant les chèvres, on jouait au gangster avec des morceaux de bois en guise de revolver.

 

…Toutes les maisons à Vaison étaient habitées, il y avait 128 enfants.


..Il y avait beaucoup d’enfants et on s’entendait tous bien: on allait ensemble à l’école : selon l’endroit où on habitait (le planet, la place du vieux marché ou rue des fours ), on se donnait des points de rendez-vous et on descendait tous ensemble à l’école.

 

..Les enfants jouaient, les hommes travaillaient, les femmes aussi qu’on retrouvait au lavoir.


« Dès l’âge de 14 ans, j’y allais avec ma brouette ; c’était un grand lavoir qui s’étendait, à la place du parking actuel, sous le rocher : c’était très bien: on pouvait y aller quand il pleuvait car on était abrité.

 

A côté du lavoir il y avait un petit « rinçoir « et au-dessus un petit champ ou on étendait le linge, chacun à son tour.

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Ce lavoir a disparu quand le rocher est tombé, un soir vers 23 heures en 1965.

L'eau


…Entre temps, comme on avait pas l’eau à la maison, on allait laver avec la charrette chargée de 2 lessiveuses, en bas, dans le canal (il existe encore mais il n’y a plus d’eau) derrière l’ancienne caserne des sapeurs-pompiers. C’était dur et très physique car il fallait descendre et tout remonter.

 

Toutes les fontaines fonctionnaient avec l’eau potable du Crestet. Moi qui habitait de l’autre côté, j’allais chercher l’eau à la fontaine, contre le mur du jardin de Yann : avant de passer sous le beffroi, dans le virage, il y avait une fontaine juste en face de l’ancienne Mairie. Il y avait aussi une jolie petite fontaine près de l’église qui a été volée. Mais l’eau ne coulait pas assez vite et nous on allait là où ça tournait vite, car on charriait des seaux d’eau.

 

Mes parents ont fait mettre l’eau en 1955, l’année où je me suis mariée, car je n’étais plus là pour charrier les seaux d’eau,

 

On n’avait pas non plus de WC : ils étaient dans le jardin ...mon père avait fait une planche carrée avec un trou et avait mis un pot de chambre par-dessus. Il y avait un seau et une pelle et on versait les cendres récupérées dans la cheminée.

 

Il n’y avait pas d’égouts non plus : l’eau sortait dans la rue…l’électricité on l’avait. ; Mais, quand on est rentré ici il n’y avait qu’une lampe : il a fallu qu’on installe l’électricité partout.

 

Les Rues


Le pavage n’existait pas encore. La rue était à moitié pavé et au milieu il y avait de la terre….Le problème c’était les poubelles ; quand on était jeune, le ramassage avait lieu une fois par semaine. Il y avait 2 ou 3 endroits: au pied du platane, rue des Fours et devant la fontaine ou s’entassaient les poubelles. Millon passait avec sa charrette et chargeait toutes les ordures…A côté de la porte de Nanou en face de chez Ambrogiani (17 rue de l'Eveche), il y avait un tas de fumier car ils avaient un cheval.

Les Parisiens


Les premiers parisiens arrivés c’étaient les Martet, puis Mme Janin et sa fille Michèle…Je ne me souviens plus en quelle année mais je n’étais pas né (je suis née en 1932) je me souviens de sa voiture de Mme Janin car c’était la seule qu’il y avait dans la Haute Ville (une Peugeot,). Elle était très gentille.

Le Travail


..Ici il y avait beaucoup d’activité et du travail pour tout le monde : on descendait en ville pour travailler: l’usine Fabre, (outils agricoles, des sulfateurs..) dans la zone près de la mairie;  l’imprimerie Macchabée;  le four à chaux (fabrication de chaux blanche) d’abord situé à la montée du poids et après sur la route de Malaucène là ou est Missolin. 

 

L’usine à soie (le grand bâtiment en bas de la Haute Ville); et la fabrication des soufflets (pour l’usine Fabre) que les femmes faisaient devant la porte des maisons de la Haute Ville: ma mère et celle d’Yves, ma marraine, la mère Roland. Toutes avaient leur « viadous (établis en provençal), petit établis carré, posé sur 4 pieds, avec un rebord ou on déposait les clous et les pots d’un cote et de l’autre les morceaux de bois qu’on allait ramasser au bord de l’Ouvèze.

 

Après (la guerre en 1945 ) les usines ont fermé: d’abord la soierie, qui a été remplacée par Michel Paris qui travaillait pour Yves St Laurent : il nous achetait les cocons qu’on allait ramasser dans l’escalier car il y avait plein de muriers. Les femmes travaillaient là-bas: puis à l’usine Macabet.

 

Les gens…ils se mariaient et quittaient la Haute Ville. Ils n’étaient pas propriétaires et à cette époque les maisons se vendaient bien car elles n’étaient pas chères : Puis tout le monde est parti …

La Guerre dans la Haute Ville

 

Il y avait quelques jeunes qui étaient résistants. Les allemands venaient . Ils nous ont arrêtées avec ma sœur et ma mère le 10 juin 1944…(Sans l’intervention du maire, le Dr Desplans, ils auraient assassinés tous les hommes. Ils avaient réuni tout le monde Place Montfort, pour venger des « Boches » qui s’étaient fait tirés dessus .


Mon père avait préparé notre valise avec nos papiers car il voulait partir….Maman m’avait emmenée voir ma marraine place du Marché; quand ça a été plus calme; est rentré : on voit toute une bande d’allemands: ils nous ont fait monter dans la petite rue (Montée de la Piégonne), là où vivaient les Morganti, des gitans qui avaient acheté une vieille maison: ils étaient venus d’Avignon pour se cacher car là-bas c’était dangereux pour eux …Les allemands nous ont emmenés chez les gitans en nous donnant l’ordre de ne pas bouger ; Ils cherchaient un maquisard (le fils de la boulangère) qui s’était caché dans le château. Ils ont interrogé les filles Morganti qui ont dit qu’elles n’avaient vu personne : les allemands étaient à peine partis qu’on a vu le jeune sortir en courant du château et s’enfuir de l’autre côté avec une corde .

Ici, les résistants ne faisaient rien, ils passaient c’est tout …Comme les allemands avaient tué un petit de dix ans qu’ils soupçonnaient d’aller prévenir les maquisards, on disait aux enfants de ne pas courir. Un jour, en revenant de l’école par le quai Pasteur on a vu plein d’allemands qui venaient d’arrêter des juifs.

 

Il y avait des juifs à côté de chez nous : Mr et Mme Bolber….Le 10 juin, quand les allemands avaient fait sortir tout le monde place de l’Église, M Bolber a sauvé un vieux garçon saoul que les allemands voulaient arrêter : comme il parlait allemand il leur a expliqué qu’il n’était pas méchant mais qu’il avait bu …M.Bolber est revenu 30 ans après et on s’est revu. Il avait une usine de bijoux à Paris. Ils sont restés toute la guerre à Vaison, dans la maison à cote du Murier ; ils venaient souvent parler avec nous.

 

Le jour de la Libération, quand on a entendu les gens dire « les américains arrivent «, il est sorti de chez lui avec un énorme drapeau bleu blanc rouge et il est descendu en courant jusqu’au Pont Romain, sa femme courait derrière lui, et nous aussi pour les voir et les accueillir !

                 

La Libération c’était formidable. !

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